L'obéissance d'amitié, un modèle managérial inspirant

Les sapeurs-pompiers, un modèle managérial inspirant !

 

Le monde du travail évolue constamment, et les entreprises cherchent à la fois l'efficacité et l'épanouissement de leurs collaborateurs dans un cadre de culture de sécurité. Les approches traditionnelles du management et de l'autorité sont régulièrement remises en question

Commandement ou management ?

Commander consiste à diriger une équipe dans l'action, en particulier dans des situations difficiles ou risquées, tout en recherchant l'efficacité opérationnelle des membres de l'équipe. Cela implique d'exercer une autorité sur l'équipe et d'assumer pleinement ses responsabilités dans des circonstances extraordinaires.

En revanche, manager signifie mobiliser un groupe pour atteindre la performance, en tirant le meilleur parti des qualités et du potentiel de chacun au sein de l'organisation, notamment lors de la préparation d'une action. Manager implique donc d'organiser, de gérer et de prévoir dans divers domaines : technique, administratif et humain. La réussite d'une entité repose sur l'optimisation des ressources humaines.

Ainsi, commandement et management se complètent et se rejoignent. Il s'agit de gérer le quotidien du personnel, de le préparer au mieux à l'action, puis d'assurer l'efficacité et le succès lors de celle-ci. On commande dans l'action et on manage dans la préparation.

 

Un équilibre délicat pour Le manager (le chef)

Le manager doit établir son autorité tout en développant des relations hiérarchiques humaines. Il ne s'agit pas d'afficher une bienveillance de façade, mais d'établir des relations de confiance authentiques. Cette qualité relationnelle est essentielle pour favoriser la coopération au sein des équipes. Pour le leader, cela nécessite une compréhension des dynamiques humaines et un effort constant pour maintenir un équilibre entre autorité et proximité.

 

Les sapeurs-pompiers, experts en la matière

Chez les sapeurs-pompiers, cet équilibre est pratiqué quotidiennement depuis plus d'un siècle. La réussite des missions repose sur une obéissance hiérarchique claire, renforcée par des liens de camaraderie. Ce concept, appelé « obéissance d'amitié », incite chaque manager à rechercher la bonne combinaison entre autorité et amitié dans ses relations avec son équipe, qu'elle soit composée de professionnels et/ou de volontaires.

 

La discipline, c'est l'obéissance d'amitié

« La discipline dans les services d'incendie, c'est l'obéissance d'amitié. » C'est ainsi que le règlement d'instruction et de manœuvre de 1954 définit l'art du commandement pour les officiers de sapeurs-pompiers. Cette notion découle de la devise du Général d'Armée Aubert Frère (1881 - 1944) : « J'obéis d'amitié. »

 

Obéissance éclairée ou obéissance aveugle ?

L'obéissance consiste à suivre les directives du chef (manager). Si la légitimité de ces directives est reconnue, l'obéissance est naturelle. Dans le cas contraire, il s'agit d'une obéissance aveugle. Aujourd'hui, le chef se retrouve souvent seul face à ses décisions, sans soutien ni éclairage.

 

L'importance de l'adhésion des équipes

L'enjeu est crucial, car, chez les sapeurs pompiers, lors d'un incendie, le chef n'est pas toujours en contact direct avec le foyer. Il doit prendre des décisions et élaborer des stratégies après une reconnaissance rapide du chantier, en se basant sur les informations remontées au poste de commandement par ses chefs équipes. Bien que chacun obéisse aux ordres, il est essentiel d'avoir une forte adhésion de la part des équipes.

 

Confiance et intégrité : les clés de la réussite

L'obéissance aveugle peut engendrer des comportements néfastes lorsque l'individu met de côté l'intérêt collectif ou l'éthique. Dans ce cas, le lien avec le chef (manager) devient mécanique et déshumanisé. L'obéissance d'amitié, en revanche, sécurise le décideur en plaçant la qualité de la relation au premier plan tout en maintenant un devoir d'obéissance.

La confiance doit être réciproque : l'équipe doit avoir confiance en son chef, et vice versa. Sans cette confiance mutuelle, rien n'est possible. Une confiance solide réduit le stress et diminue les tentatives de désengagement au travail. Plus les membres de l'équipe sont reliés par des valeurs humaines, plus le niveau de confiance est élevé, favorisant ainsi la coopération et réduisant le risque d'erreurs.

 

Faire alliance : la clé de l'obéissance d'amitié

Pour développer la confiance et obtenir l'obéissance d'amitié, le chef (manager) doit viser une transparence et une intégrité maximales. Cela implique un alignement cohérent entre ce que l'on pense, ce que l'on dit et ce que l'on fait. Psychologiquement, cette posture peut être comparée à celle d'un thérapeute établissant une alliance avec son patient.

 

L'empathie, la chaleur humaine et l'authenticité : les ingrédients essentiels

La capacité d'un chef (manager) à bien diriger les équipes repose autant sur une connaissance de soi authentique et intègre que sur ses compétences techniques. Le chef (manager) a le pouvoir d'influencer la relation. La confiance, fondée sur l'affect, facilite une action coordonnée et efficace au sein des organisations.

Les règles de management ne sont pas efficaces en raison de leurs outils, mais grâce à l'adéquation subtile entre un chef (manager) et son personnel. En tant que chef (manager), même avec les meilleures stratégies ou compétences techniques, c'est la manière dont vous interagissez avec vos équipes qui déterminera votre leadership.

 

Mieux que les paroles, les actes

Voyons comment se manifestent au quotidien les actes empathiques, chaleureux et sincères.

 

Chaleur Humaine : Accueillir les nouvelles recrues avec un café ou participer à un déjeuner collectif améliore la performance. En période de crise, prendre le temps d'accueillir les renforts sur le terrain par une poignée de mains et quelques mots sur la situation renforce l'inclusion au sein de l'équipe.

 

Empathie : Considérez qu'un collaborateur demandant un service en a réellement besoin. Cela représente une opportunité de l'aider. Chaque collaborateur doit être connu du management, tant sur le plan professionnel que personnel. Les défaillances inattendues sont souvent liées à des circonstances personnelles.

 

Intégrité : Soyez aligné avec vos paroles. Promettre l'impossible ou donner des informations contradictoires est rapidement démasqué. Si une décision est prise, ne laissez pas planer le doute. Entretenir de faux espoirs est dévastateur.

 

Conclusion : un modèle à suivre

En cultivant des relations interpersonnelles solides et un climat de confiance, les sapeurs-pompiers renforcent leur cohésion d'équipe et, par conséquent, leur efficacité opérationnelle. Loin d'être un luxe, il est essentiel pour chaque chef (manager) d'encourager ces dynamiques en adoptant une posture chaleureuse, empathique et intègre.

Les organisations devraient évaluer l'intégrité lors du recrutement et des entretiens annuels. De plus, promouvoir une bienveillance sincère peut renforcer la confiance, diminuer le stress et réduire le désengagement au quotidien.

Certains soutiennent que le travail n'est pas un lieu pour se faire des amis. Certes, mais n'est-il pas préférable d'inviter les valeurs de l'amitié à notre table professionnelle plutôt que celles de l'adversité ? Adoptons une approche pragmatique plutôt que dogmatique : si l'obéissance d'amitié fonctionne lors des opérations de secours et à la caserne, pourquoi ne pas l'appliquer dans le monde de l'entreprise ?

 

Osez l'obéissance et l'amitié

L'obéissance d'amitié n'est pas un concept managérial nouveau. C'est un levier de performance ancien et éprouvé dans les professions à haut risque, qui pourrait également être bénéfique dans tous les contextes professionnels.